Le premier jour du reste de ta vie

Le premier jour du reste de ta vie
Le premier jour du reste de ta vie, pour moi, c’est ce jour où se produit une rupture avec cette personne que tu étais avant, et celle que tu seras après. Pour beaucoup de femmes c’est le jour où elles mettent au monde leur premier enfant. Pour les hommes je ne sais pas trop, peut-être que la paternité les transforment aussi, difficile à dire.
Mais pour moi c’est différent. Le premier jour du reste de ma vie est le jour où je me suis assise dans le bureau de ma chef de l’époque et où je lui ai dit : « Je veux partir. Je reprends ma liberté ! ». Je n’avais pas de nouveau boulot en vue, rien de précis en tête… juste un sentiment de coupe pleine, pleine à ras bord et que je voulais tout simplement vider.

Dimanche, j’ai assisté à ma première réunion du réseau Women up – La fusée. Une association que je souhaite rejoindre et qui entend démontrer que la mixité en entreprise est une évidence pour les Millennials (la génération Y), une source d’épanouissement et d’enrichissement. J’étais bizarrement très intimidée par ces jeunes hommes et femmes qui très tôt dans leur carrière ont eu envie de combattre les inégalités, les clichés, les stéréotypes en entreprises. Cette génération Y, dont je fais partie, ne veut plus qu’on la brocarde. Oui nous avons du potentiel, oui quand nous sommes une femme nous avons le droit de le revendiquer, oui l’équilibre vie pro/vie perso est possible et oui l’Entreprise doit muter pour nous intégrer.

Et pour y arriver, je crois que le mot sacrifice est à bannir, car il a une signification, une symbolique et un poids historique trop lourd pour nos épaules. Le sacrifice dans la tradition judéo-chrétienne et dont nous sommes nombreux à être les héritiers (toutes considérations religieuses mises à part), c’est Abraham prêt à sacrifier son fils pour prouver sa foi, c’est Jésus (prophète ou messie) qui s’offre en sacrifice pour le salut de l’Homme, mais c’est aussi Adam et Eve, punis pour leur péché, condamnés à travailler pour vivre et à souffrir pour enfanter. Je trouve que les mots parlent d’eux mêmes et apportent un éclairage intéressant sur l’héritage que nous portons en nous et les idées qui en résultent. Plus dramatique encore ce sont toutes ces populations qui ont été ou qui sont encore sacrifiées au nom d’idéologies religieuses, sectaires. C’est l’arme des génocides.

Dans nos vies de tous les jours la notion de sacrifice est une croyance limitante qui parasite beaucoup trop de choses. Le sacrifice est inutile.

Mais retour à ce jour de rupture donc.
Le « sacrifice » de mes idées, de ma famille, de mes espoirs, de tout ce en quoi je croyais était fini. Certains ont pensé que je crachais dans la soupe de ceux qui me la servait, d’autres ont applaudit ce courage ultime que j’ai eu de tout plaquer. Par mon départ j’étais fière de dire « vous avez failli m’avoir mais je suis plus forte ». Parce que oui la vie en entreprise était devenue pour moi une prison, une prison dorée certes, où on te payes pour venir chaque jour, mais une prison quand même. J’ai débuté dans la vie active à 23 ans, un bébé donc. Je n’ai malheureusement pas eu de guide pour m’aider à décrypter les comportements, éviter les pièges. J’ai rencontré et observé beaucoup de managers (tous sexes confondus) : des alcooliques, colériques, sexistes, misogynes, misandres, dragueurs, hystériques, workaholic, dépressifs, manipulateurs, menteurs, et parmi eux, un seul vraiment bienveillant.
Un jour on m’a dit « mais tu sais ton employeur ce n’est pas toi en tant qu’être humain qu’il recrute, c’est toi en tant qu’expert dans ton domaine, donc ta personnalité il s’en fiche. », alors je suis rentrée dans le moule qu’on avait préparé pour moi, serrant les dents quand on me reprochait de prendre mes jours enfants malades, serrant encore plus fort quand on me demandait avant de m’attribuer un projet intéressant si je prévoyais de demander un 4/5ème, ravalant ma fierté quand on m’a annoncé que malgré mon ancienneté, mon professionnalisme, mes résultats et mon implication il n’y avait aucune raison valable de me donner un statut cadre et que d’ailleurs on voyait pas bien pourquoi j’osais le demander…

Alors, ce premier jour du reste de ma vie j’ai donc vidé ma coupe sans préavis, ni sans trop savoir avec quoi j’allais la remplir le jour d’après. Et faute de trouver une nouvelle entreprise où je puisse me sentir libre d’être moi-même (et pas ce que mon manager attend que je sois), j’ai créé ma petite boîte à moi. Cette nouvelle vie que j’expérimente est en grande partie faite d’incertitudes, de nouveaux défis, de doutes ; mais au moins il n’y a désormais plus aucun moule disponible sur le marché dans lequel je puisse rentrer.

Et vous ? quel est le premier jour du reste de votre vie ?

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